Thursday 01 January

Donner est un acte simple en pratique et souvent spontané. Cette spontanéité peut toutefois mener à bien des déconvenues et il est toujours nécessaire de s’encadrer de conseils à l’occasion de toute donation consentie à ses enfants. En effet, qui ne connaît pas de familles s’étant déchirée au décès des parents ou encore de familles brouillées pour de sombres histoires d’argent ? Souvent cette brouille tire sa source dans les donations consenties par les parents à leurs enfants, tout à fait spontanément et sans arrière-pensée … L’archétype du cadeau qui devient empoisonné !

Vincent DE BAETS, notaire associé, vous dit pourquoi

1 - Rappel des règles légales

La donation est l’acte par lequel une personne (le donateur) abandonne irrévocablement un bien au profit d’une autre personne qui l’accepte (le donataire).

1.1 Donation et don manuel

Elle peut prendre plusieurs formes :

  • La rédaction d’un acte de donation, lequel ne peut être établi sous aucune autre forme que notariée à peine de nullité (Article 931 du code civil) 

  • Le don manuel, qui consiste en un don « de la main à la main » qui ne requiert aucun écrit.

Il peut s’agir d’un virement d’une somme d’argent sur le compte du donataire ou encore d’un transfert d’actions sur le compte titre du donataire ….

Dans les faits, on constate que le don manuel est souvent utilisé par les parents pour aider leurs enfants, notamment au moment de grandes étapes de leurs vies : achat d’un premier bien immobilier par exemple …

Cette prépondérance du don manuel s’explique par la simplicité apparente de ce don : pas de formalisme (pas besoin d’écrit) et solution économique (absence d’intervention de conseils). Pourtant cette simplicité n’est qu’apparente et le don manuel, simple sur l’instant, peut se transformer en véritable cadeau empoisonné pour votre famille ...

Pour mieux comprendre, il est nécessaire de faire un peu d’histoire. Notre droit contemporain, principalement en matière de droit de la famille, tire sa source du code civil Napoléonien de 1804. Une époque où nous sommes en rupture marquée avec les privilèges de l’ancien régime et inspirée par un principe d’égalité stricte.

 

1.2 Règles du code civil

Par suite, le code civil français organise une égalité parfaite entre les enfants en matière d’héritage, sauf volonté contraire des parents, auxquels il n’est laissé qu’une liberté relative.

Ceci résulte de règles complexes que nous pouvons résumer comme suit :

1. La réserve héréditaire & la Quotité Disponible :

Il est profondément ancré dans l’esprit des français qu’il n’est pas possible de déshériter ses enfants. Ce grand principe est organisé par le code civil qui prévoit que le patrimoine des parents tel qu’il aurait été s’ils n’avaient consenti aucune donation de leur vivant doit être décomposé en deux parties :

  • La quotité disponible : il s’agit de la part du patrimoine des parents qui est libre et dont ils peuvent faire ce qu’ils veulent. Il est ainsi possible de donner à des personnes autres que ses enfants dans la limite de cette quotité. Il est de même possible d’avantager l’un de ses enfants par rapport aux autres, mais dans la limite de cette quotité.

  • Et la réserve héréditaire : il s’agit de la part du patrimoine des parents qui doit impérativement revenir à leurs enfants 

Cette réserve héréditaire se divise de manière égale entre les enfants, chaque enfant devant à minima recevoir sa part de réserve héréditaire.

Le code civil prévoit que la Quotité Disponible est de la moitié en présence d’un enfant, d’un tiers en présence de deux enfants et d’un quart en présence de trois enfants ou plus.

Ainsi, pour un couple qui dispose de 3 enfants :

  • La Quotité Disponible est d’un quart de leur patrimoine tel qu’il aurait été sans donation ;

  • Et la réserve héréditaire est de trois quarts, à partager en trois entre les enfants, soit ¼ chacun.

Afin de vérifier au décès des parents qu’il n’a pas été porté atteinte à la part de réserve héréditaire de chaque enfant, il est procédé à une opération fictive de recomposition de leur patrimoine tel qu’il aurait été sans donation.

Ainsi, il est ajouté au patrimoine laissé par un parent à son décès l’ensemble des dons consentis par lui de son vivant. Ces dons sont alors, sauf exception, réévalués. Puis il est vérifié que chaque don, par ordre chronologique, n’est pas venu porter atteinte à la part de réserve de chaque enfant.

 

2. Les donations en avancement de part successorale & hors parts successorales :

Lorsqu’une donation est consentie à un enfant, ce don peut constituer :

  • Soit une avance sur sa part d’héritage :

C’est-à-dire que ce don doit être pris sur la part de réserve héréditaire de l’enfant concerné et qu’il devra en être tenu compte au décès du parent.

La donation est alors dite « en avancement de part successorale ».

  • Soit un cadeau / avantage par rapport aux autres enfants :

C’est-à-dire que la donation est prise sur la Quotité Disponible et que le don vient rompre l’égalité entre les enfants. A ce titre, et à condition que le don ne dépasse pas la Quotité Disponible, il n’en sera pas tenu compte au décès du parent, l’enfant donataire ayant été définitivement avantagé.

Par principe, le droit français suppose que les parents ont une volonté égalitaire et qu’ils ne souhaitent pas avantager l’un de leurs enfants par rapport aux autres.

En conséquence, sauf s’il est écrit le contraire, toute donation consentie à ses enfants est présumée être une donation en avancement de part successorale.

Si nous revenons au don manuel, sans écrit, il sera donc, dans tous les cas, supposé constituer une « avance sur héritage ». Sur le principe, la plupart des parents approuveront cette « supposition » mais cela est sans compter sur le mécanisme du rapport des donations qui emporte leur réévaluation.

 

  1. Le rapport des donations consenties en avancement de part successorales :

Les donations constituant des « avances sur héritages » doivent être rapportées à la masse à partager entre les héritiers afin qu’il puisse en être tenu compte.

Pour mieux comprendre ce rapport, illustrons-le par l’exemple :

Soit Jean, père de 2 enfants : Paul & Sophie.

En 2010, Jean a donné à Paul 100.000 Euros.

En 2018, Jean décède en laissant une somme de 100.000 Euros sur son compte et un appartement de 200.000 Euros.

A son décès, la masse à partager sera donc composée de :

- Rapport par Paul de sa donation......................................  100.000 €

- Somme d’argent sur compte du défunt ...................  100.000 €

- Appartement du défunt.........................................................  200.000 €

TOTAL MASSE A PARTAGER................................................................. 400.000 €

Revenant à chaque enfant à hauteur de.......................  ½

Soit pour chacun d’eux................................................................200.000 €

Paul a déjà reçu..............................................................................  100.000 €

Il lui reste donc à prendre au décès de son père.  100.000 €

Sophie n’a rien reçu,

Elle prendra donc au décès de son père.....................  200.000 €

Exposé comme cela, le rapport des donations antérieures ne semble pas poser de difficultés.

Toutefois, c’est sans compter sur le mécanisme de réévaluation des donations antérieures. En effet, le code civil prévoit que le rapport des donations antérieures doit être réalisé :

  • Lorsqu’il s’agissait d’une donation de somme d’argent : sur la base réévaluée compte tenu de l’usage qui a été fait de la somme d’argent ;

  • Lorsqu’il s’agissant d’un bien physique : sur la base de la valeur de ce bien, pour l’état dans lequel il se trouvait au jour de la donation, au jour du décès ;

Et en cas de vente de ce bien, ou du bien acquis au moyen de la somme d’argent donnée, il est tenu compte de la valeur du don dans la nouvelle acquisition.

Seuls les biens soumis à inéluctable dépréciation (par exemple une voiture) ne sont pas réévalués. Ce mécanisme de réévaluation vise à maintenir une égalité entre les enfants, pour compenser l’érosion monétaire.

En effet, si Jean donne 100.000€ en 2003 à Paul, avec cette somme Paul a pu s’acheter un appartement de 2 pièces dans PARIS sans difficulté.

Or, si Sophie reçoit 100.000€ en compensation en 2018 (puisqu’elle n’a pas reçu de don de son vivant), avec cette même somme il lui sera totalement impossible d’acheter un 2 pièces dans Paris …

Et c’est alors que surviennent les conflits entre les enfants, au décès de leurs parents

 

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2 - Avis d’expert : Comment prévenir les conflits entre ses enfants ?

Il existe deux grands types de donations, la donation simple et la donation partage. 

2.2 La donation partage

 

Afin d’éviter toute discorde entre ses enfants, le code civil prévoit une catégorie spécifique de donation : « la donation-partage ».

Cette donation est celle réalisée par acte notarié, par une personne, à tous ses enfants en même temps.

Sous réserve que cette donation ne comporte pas de réserve d’usufruit sur somme d’argent, cette donation ne sera pas réévaluée au décès du donateur pour le calcul de la Réserve Héréditaire et de la Quotité Disponible.

D’autre part, cette donation ne sera pas rapportable et il n’en sera donc plus tenu compte au décès du donateur (sauf le cas très particulier de certaines donations partages inégalitaires).

 

2.3 La donation simple

La vie est ainsi faite, tous les enfants n’ont pas forcément les mêmes besoins en même temps.

Et il n’est souvent pas non plus possible pour les parents d’aider tous leurs enfants en même temps …

La donation partage est donc parfois impossible à mettre en œuvre lorsqu’il s’agit d’aider l’un de ses enfants à un moment donné.

En pareil cas, il n’y aura pas d’autre choix que de réaliser une donation « simple », c’est-à-dire à l’enfant concerné seulement.

Cette donation peut bien sûr prendre la forme d’un don manuel qui emporte, dans le silence des parties, adhésion à l’ensemble des dispositions du code civil français à savoir :

  • Présomption d’une donation « en avancement de part successorale » ;
  • Et rapport du don pour un montant réévalué au décès.

Mais cette donation peut encore prendre la forme d’une donation notariée dans laquelle le donateur pourra librement exprimer une volonté contraire.

Il pourra ainsi être prévu que le rapport de la donation ne se fera que pour une valeur forfaitaire non réévaluée ; l’excédent constitue ainsi un « cadeau » qui vient avantager le donataire et qui s’imputera sur la Quotité Disponible du donateur (à la condition qu’elle n’ait pas déjà été totalement utilisée).

 

2.3 « Rattraper » les donations déjà réalisées qui n’auraient pas été correctement réalisées 

Vous lisez ces lignes et les donations ont déjà été consenties … Que faire ?

Les choses ne sont perdues pour autant mais le coût risque d’en être plus élevé.

En effet, il est toujours possible de demander à ses enfants, à l’occasion d’une donation nouvelle, de rendre ce qu’ils ont reçus antérieurement pour leur redonner sous forme de donation-partage. On parle alors de réincorporation à la donation.

Prenez ainsi le cas suivant, cas réel :

Une mère a donné à ses 3 filles 150.000€ à chacune d’elles sous forme de don manuel :

  • La première a investi ces fonds dans l’achat d’une maison de campagne qui n’a pas pris de valeur 
  • La seconde a investit ces fonds dans l’achat d’un appartement à PARIS qui a pris une valeur considérable 
  • La troisième a dépensé ces fonds dans les besoins de sa vie quotidienne et un divorce couteux.

Ces dons manuels ont été enregistrés auprès des Impôts.

De manière récurrente ces dons sont évoqués entre les 3 filles et la mère sent poindre les rancœurs et jalousies entre ses filles …

Il sera alors toujours possible, pour cette mère, de faire une donation partage chez son notaire en demandant à chacune de ses filles de réincorporer les dons qu’elles ont reçu antérieurement dans cette nouvelle donation, afin qu’ils leurs soient réattribués en la forme partage et que la question de leur évaluation à son décès ne se pose plus.

Cela étant, cette réincorporation n’est pas gratuite …

En effet, la donation-partage a une double nature : c’est une donation et un partage. Il existe une fiscalité pour la donation (droits de mutation à titre gratuit de 0 à 45%) et une fiscalité pour le partage (2,5% de l’actif net partagé). Comme il ne peut être perçu deux impôts pour une même chose, lorsque la donation et le partage sont opérés simultanément, l’administration ne retient que l’impôt prépondérant : celui sur la donation.

Mais, dans notre exemple, la donation a eu lieu lors du don manuel enregistré aux impôts …

Et à la signature chez le notaire de la donation-partage, il ne s’opère donc plus que le partage qui est donc taxé à 2,5%.

 

En conclusion, nous pouvons voir que donner à ses enfants peut s’avérer bien plus complexe qu’un simple chèque ou virement.

Il convient donc d’en maitriser tous les aspects et de se faire assister.

 

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3 - Cas pratique

Jean a deux enfants : Paul & Sophie. En 2002, Paul achète son premier logement et Jean décide de l’aider à concurrence de 100.000€.

Paul achète, avec ce don un appartement à PARIS pour un coût total d’acquisition de 200.000€.

En 2010, Paul revend ce logement 400.000€ et réinvesti la totalité du prix de vente dans l’achat d’un nouveau logement à PARIS pour un coût total de 600.000€ dont la valeur est de 900.000€ au décès de Jean en 2018.

En 2003, Jean décide de donner à Sophie une somme équivalente de 100.000€ afin de rétablir l’équilibre entre ses enfants.

Sophie décide d’en utiliser 20.000€ pour acheter une voiture et épargne le complément de 80.000€.

En 2010, elle achète son premier logement pour un coût total de 400.000€ avec comme apport personnel les 80.000€ épargnés.

Ce logement, qu’elle a conservé depuis, vaut 600.000€ au décès de Jean en 2018.

Au décès de Jean, il ne laisse aucun autre bien que son appartement en Seine-et-Marne évalué à 300.000€.

 

Hypothèse 1 :

Si Jean a consenti la donation des 200.000 € (100.000€ à chaque enfant) sous forme de donation-partage, il n’y aura plus lieu de parler de la donation antérieure.

Par suite, Paul & Sophie se partageront l’appartement laissé par leur père de 300.000€, soit 150.000€ chacun.

 

Hypothèse 2 :

Si les donations de 100.000€ à chaque enfant n’ont pas été consenties sous forme de donation-partage :

  • Paul devra rapporter son don qui sera réévalué comme suit :

- Lors de l’achat de son premier logement, le don représentait 50% du coût total d’acquisition ;

- A la revente du bien à 400.000€, la part de la donation dans ce prix de vente était donc de 50% soit 200.000€ ;

- Au rachat du nouvel appartement pour 600.000€, la fraction du don initial représentait donc 1/3 du coût total d’acquisition ;

- Au décès de Jean, ce nouvel appartement vaut 900.000€ dont 1/3 représente la donation initiale soit 300.000 € que Paul devra rapporter à la masse à partager.

  • Sophie devra rapporter son don qui sera réévalué comme suit :

- Les 20.000€ utilisés pour acheter la voiture seront rapportés pour leur valeur forfaitaire puisque la voiture est soumise à inéluctable dépréciation (sa valeur ne cesse de diminuer sauf voiture de collection) ;

- Les 80.000€ utilisés pour acheter l’appartement représentent 20% du coût total d’acquisition ;

- Au décès de Jean, l’appartement vaut 600.000€ dont 20% représente la donation initiale soit 120.000 € que Sophie devra rapporter à la masse à partager.

 

En conséquence la masse à partager entre les enfants, par parts égales, est composée de :

  1. Rapport effectué par Paul : 300.000 €
  2. Rapport effectué par Sophie : 140.000 € (120.000€ + 20.000€)
  3. Appartement du défunt : 300.000 €

TOTAL : 740.000 €

DONT LA MOITIE POUR CHAQUE ENFANT SOIT 370.000€

En conséquence Paul aura droit à 70.000€ à prendre sur les biens de Jean pour compléter sa part (300.000€ déjà reçu au titre de sa donation réévaluée).

Et Sophie aura, elle, droit à 230.000€ à prendre sur les biens de Jean pour compléter sa part (140.000€ déjà reçu au titre de sa donation réévaluée).

Dans les faits, Paul & Sophie avait pourtant reçu une somme égale à 1 année d’intervalle … Chacun aurait donc pu investir cette somme pour un résultat peu ou prou identique.

On comprend à présent mieux pourquoi autant de successions se règlent dans la douleur alors, qu’à la base, tout partait d’une bonne intention : aider ses enfants.

 

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4 - Calcul et optimisation des droits de succession

Lorsqu’on veut donner à ses enfants un montant conséquent, en période de fêtes ou à n’importe quel moment, la rédaction d’un acte de donation est nécessaire pour éviter les ennuis avec le fisc.

 A La donation taxable

 

Hormis le cas particulier du « présent d’usage », toute donation est assujettie aux droits de mutation à titre gratuit.

Le calcul de ces droits de mutation est fonction du lien de parenté qui existe entre le donateur et le donataire et, plus le degré de parenté est éloigné, plus la fiscalité est importante.

Pour chaque degré de parenté, il existe ainsi un abattement et un barème proportionnel pour le calcul de l’impôt pour toute donation excédant le montant de l’abattement.

 

  1. En ce qui concerne les abattements :

 

Les abattements sont les suivants en cas de donation :

 

A un époux ou partenaire pacsé :

80.724 €

A un enfant :

100.000 €

Aux petits-enfants :

31.865 €

Aux arrières petits-enfants :

5.310 €

Pour les frère et sœur :

15.932 €

Aux neveux & nièces :

7.967 €

A toute autre personne :

0 €

 

A noter, qu’en sus de ces abattements, il existe :

 

  • Pour les donations à des personnes handicapées : un abattement « bonus » de 153.925€ qui se cumule à l’abattement ci-dessus ;

  • Et pour les donations de somme d’argent, avant 80 ans, au profit de ses enfants, petits-enfants majeurs ou, en l’absence d’enfant, de ses neveux & nièces : un abattement exceptionnel de 31.865€ qui se cumule à l’abattement ci-dessus.

 

  1. Puis, au-delà des abattements, la fiscalité est la suivante :

 

Pour un époux ou partenaire pacsé :

De 0 à 45%

Pour un enfant / petit-enfant / arrière petit-enfant

De 0 à 45%

Pour frère ou une sœur :

De 35 à 45%

Pour un neveu ou une nièce :

55%

Pour un non parent :

60%

 

Plus particulièrement, pour les enfants et petit-enfants, le barème est le suivant :

 

De 0 à 8.072€

5%

De 8.072€ à 12.109€

10%

De 12.109€ à 15.932€

15%

De 15.932€ à 552.324€

20%

De 552.324€ à 902.838€

30%

De 902.838€ à 1.805.677€

40%

Au-delà

45%

 

Chaque parent dispose de son propre jeu d’abattement & de tranches du barème.

Par conséquent, un couple peut donc donner à chaque enfant 200.000€ (et 63.730€ de somme d’argent avant 80 ans) à chacun de ses enfants sans générer paiement de droits de mutation à titre gratuit.

 

  1. Le rappel fiscal des donations :

 

Enfin, pour le calcul des droits de mutation à titre gratuit, l’administration prend en compte l’ensemble des donations réalisées au cours des 15 dernières années.

Le but est, bien évidemment, d’éviter qu’un parent ne donne en plusieurs fois, de manière rapprochée, à un enfant pour éluder l’impôt.

 

Exemple :

Jean a un fils, Pierre.

Il réalise en 2015 une première donation à Pierre de 80.000€.

Puis en 2018, il consent une seconde donation à Pierre de 80.000€.

 

La fiscalité est alors la suivante :

- En 2015 : la donation étant inférieure à 100.000€, il n’y a pas eu d’impôt à payer.

Et lors de cette donation, l’abattement a été « mangé » à concurrence de 80.000€. Il ne restait donc plus que 20.000€ sur l’abattement après cette donation.

- En 2018 : sur les 80.000€ nouvellement donnés, 20.000€ sont exonérés au titre du reliquat d’abattement disponible. Les 60.000€ restant sont taxés à 5, 10, 15 puis 20%. Soit un impôt total estimé à 10.194€.

 

Il faudra attendre 2030 pour que Jean puisse redonner 80.000€ gratuitement à Pierre et 2033 pour qu’il puisse redonner 20.000€ gratuitement.

 

B La donation comme vecteur d’optimisation des « droits de succession »

 

En cas de décès, la transmission des biens est également soumise aux droits de mutation à titre gratuit, à savoir rigoureusement le même impôt qu’en matière de donation.

Seuls les abattements peuvent éventuellement changer puisque :

 

  • Les abattements de 31.865€ et 5.310€ pour les petits-enfants et arrières petits-enfants disparaissent (il est donc préférable de gratifier ses petits-enfants ou arrières petits-enfants de son vivant) ;

  • Et un abattement de 1.594€ est mis en place pour les personnes autres que le conjoint, le partenaire pacsé, les enfants, les frère & sœur et les neveux & nièces.

 

Tout comme pour les nouvelles donations, il sera donc regardé dans le rétroviseur au décès et toutes les donations de moins de 15 ans seront prises en compte pour la détermination de l’impôt au décès.

Pour optimiser et prévenir cet impôt, donner de son vivant reste bien souvent une option intéressante.

En effet au bout de 15 ans, les abattements reviennent à Zéro, de même que les tranches du barème.

Enfin, le plus souvent, les parents ne souhaitent pas se déposséder de leur vivant. Ils donnent donc à leurs enfants leurs biens mais en s’en réservant la jouissance.

Ils ne donnent alors que la nue-propriété des biens, en s’en réservant l’usufruit (c’est-à-dire la possibilité d’utilise le bien donné et d’en percevoir les revenus).

Dans cette hypothèse, on admettra sans mal qu’il est bien moins intéressant pour un enfant de toucher un appartement au décès de ses parents que d’en bénéficier tout de suite !

En conséquence, l’administration fiscale retient une valeur bien moindre du bien donné pour le calcul de l’impôt à l’occasion de ce type de donation.

En effet, la valeur du bien donnée est alors fonction de l’âge de l’usufruitier : plus celui-ci est âgé, plus son usufruit sera faible et plus la nue-propriété étant élevée.

 

Le barème de l’usufruit / nue-propriété est le suivant :

 

Âge de l’usufruitier

Valeur de l’usufruit

Valeur de la nue-propriété

- de 21 ans révolus

90%

10%

- de 31 ans révolus

80%

20%

- de 41 ans révolus

70%

30%

- de 51 ans révolus

60%

40%

- de 61 ans révolus

50%

50%

- de 71 ans révolus

40%

60%

- de 81 ans révolus

30%

70%

- de 91 ans révolus

20%

80%

+ de 91 ans révolus

10%

90% 

 

5 - Cas pratique de calcul des droits de succession

Jean a deux enfants : Pierre & Marie.

Il est propriétaire :

- D’une maison de famille à SAINT MALO évaluée à 800.000 Euros,

- Et d’un appartement qui lui sert de résidence principale à NANTES évalué à 600.000 Euros.

Hypothèse n°1 : Absence de donation

A son décès, Jean laisse un patrimoine de 1.400.000 Euros (800K€ + 600K€)

Chacun de ses enfants a droit à la moitié de ce patrimoine, soit pour chacun d’eux 700.000 Euros.

A cette occasion, la fiscalité sera la suivante pour chaque enfant :

• Droits transmis 700.000 €

• - Abattement - 100.000 €

• Soit reste taxable 600.000 €

Taxable à 5%

Puis 10%

Puis 15%

Puis 20%

Puis 30%

Formant un impôt total de 122.962 €

 

En conséquence, pour deux enfants, le montant total des droits de succession ressortira à 245.924 Euros.

 

Hypothèse n°2 : Donation de nue-propriété

Jean a préparé sa succession et donné en 2015 la nue-propriété de sa maison de Saint Malo à ses enfants.

Au jour de la donation, Jean a 60 ans.

A l’occasion de cette donation, la fiscalité des alors la suivante pour chaque enfant :

• Droits transmis :

Moitié de la Maison en pleine propriété 400.000 €

Compte tenu de l’âge de l’usufruitier, la nue-propriété

Est évaluée à 50%

Soit valeur retenue pour la donation 200.000€

 

- Abattement - 100.000 €

Soit reste taxable 100.000 €

Taxable à 5%

Puis 10%

Puis 15%

Puis 20%

Formant un impôt total de 18.194 €

 

En conséquence, pour deux enfants, le montant total des droits s’est porté à 36.388 Euros.

 

Puis, Jean décède en 2040, soit plus de 15 ans après la donation.

Les abattements de 100.000€ par enfant ainsi que les tranches du barème se sont donc régénérées.

 

Lors de son décès ne reste plus qu’à transmettre l’appartement de NANTES évalué à 600.000€

Soit 300.000€ pour chaque enfant, taxables comme suit :

 

Droits transmis 300.000 €

- Abattement - 100.000 €

Soit reste taxable 200.000 €

Taxable à 5%

Puis 10%

Puis 15%

Puis 20%

Formant un impôt total de 38.194€

 

En conséquence, pour deux enfants, le montant total des droits de succession ressortira à 76.388 Euros.

 

Dans notre exemple, le total de l’impôt payé (donation puis succession) ressort à 112.776 Euros, à comparer avec 245.924 Euros en l’absence de donation.

 

Soit une économie d’impôt de 133.148 Euros, dans notre exemple.

 

 

* * A noter toutefois que la donation de la nue-propriété de la maison de Saint Malo par Jean n’a pas été sans conséquence pour lui, puisqu’ayant donné la nue-propriété, il ne pouvait alors plus vendre ce bien sans l’accord de ses enfants ;

*Cette difficulté pouvant être levée si cette maison avait été mise en Société Civile Immobilière.

 

 

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