Réforme à la City : une ambition britannique face à la montée en puissance de Paris ?
par Thomas Hornus, Associé chez Euroland Corporate
Dans son discours du 15 juillet 2025, Rachel Reeves, ministre britannique des Finances a lancé les « Réformes de Leeds » (cf. article Les Échos du 15 juillet 2025 : Le Royaume-Uni lance sa grande réforme de la City), une série de mesures relatives aux services financiers et visant à redynamiser la City de Londres, pilier historique de l’économie britannique.
Comment ces initiatives se positionnent-elles face à la montée en puissance de la place financière de Paris, qui ambitionne elle aussi de devenir un hub incontournable en Europe ?
Une ambition forte pour la City
Rachel Reeves a dévoilé ce qu’elle qualifie de « plus importante série de réformes des services financiers depuis une décennie » pour le Royaume-Uni. L’objectif est clair : stimuler la croissance économique en libérant le potentiel du secteur financier, qui représente 9 % du PIB britannique et emploie 1,2 million de personnes. Parmi les mesures phares, on note une simplification des prospectus pour les émissions d’actions, une incitation des particuliers à investir en actions via des campagnes publicitaires, un assouplissement des règles prudentielles pour les petites banques, et une facilitation de l’accès aux prêts immobiliers. La ministre veut ainsi alléger une régulation, héritage de la crise de 2008, jugée trop restrictive.
Ces réformes s’inscrivent dans un contexte économique fragile, avec une contraction de l’économie britannique pour le deuxième mois consécutif en mai 2025. Cette dérégulation ciblée a pour objectifs d’attirer les entreprises internationales et de redonner du souffle à la City et comprend notamment :
le relèvement du seuil des actifs pour les exigences de fonds propres permettant aux petites banques de gagner en flexibilité, tout en maintenant des garde-fous, et
le report de l’application des règles de Bâle III à 2028 pour les activités de trading, délais adoptés par les États-Unis et l’Union européenne.
Paris, une concurrente qui ne dort pas
Si Londres cherche à consolider son statut de leader mondial, Paris n’est pas en reste. Depuis le Brexit, la capitale française a su tirer son épingle du jeu pour devenir une place financière de premier plan en Europe. Avec des incitations fiscales attractives, une régulation modernisée et des investissements massifs dans les infrastructures, Paris a attiré de nombreuses institutions financières, notamment des banques d’investissement et des gestionnaires d’actifs.
La France a misé sur une approche différente : plutôt que de déréguler à tout-va, elle a renforcé l’attractivité de sa place financière par une simplification administrative et une communication proactive auprès des investisseurs internationaux. Facilité d’installation des entreprises étrangères, réformes fiscales, et finance durable rendent Paris plus compétitive.
Un parallèle riche d’enseignements
D’un côté, la City, forte de son histoire et de son rayonnement mondial, opte pour une stratégie de dérégulation audacieuse, prenant le risque de fragiliser la stabilité financière pour relancer la croissance. De l’autre, Paris adopte une approche plus équilibrée, combinant attractivité fiscale, simplification administrative et leadership dans la finance verte. Si Londres mise sur la prise de risque, Paris joue la carte de la stabilité et de l’innovation, deux approches qui reflètent des philosophies différentes face à un même défi : rester compétitif dans un monde post-Brexit.
Un point commun émerge toutefois : l’importance accordée aux investisseurs individuels
à Londres, Rachel Reeves envisage des campagnes publicitaires pour inciter les Britanniques à investir en actions,
à Paris, des dispositifs comme le PEA et des campagnes éducatives menées par l’Autorité des Marchés Financiers visent également à dynamiser l’investissement des particuliers.
Cette convergence montre que les deux places financières reconnaissent le potentiel des retail investors pour stimuler leurs marchés de capitaux.
Les défis à venir
Pour Londres, le pari de Rachel Reeves est risqué. En assouplissant les règles prudentielles, elle doit éviter un retour aux excès d’avant 2008, tout en répondant aux pressions fiscales qui pourraient décourager les investisseurs étrangers.
Paris, quant à elle, doit continuer à prouver qu’elle peut rivaliser avec la profondeur et la liquidité des marchés londoniens, tout en capitalisant sur son positionnement européen. Les deux places financières se livrent à une course où l’équilibre entre croissance et stabilité sera déterminant.
Alors que Londres cherche à redevenir la « destination numéro un » des services financiers d’ici 2035, Paris avance ses pions avec une stratégie qui combine attractivité et durabilité. Une chose est sûre : dans cette compétition mondiale, les investisseurs, qu’ils soient institutionnels ou particuliers, auront un rôle clé à jouer.
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