Les marchés : Fomo !
Après quatre séances de hausse, la Bourse de Paris poursuit sa pause ce mercredi. Le CAC 40 recule de 0,47% à 7 837 points, tout en restant solidement ancré au-dessus des 7 500. Ce repli s’explique avant tout par une correction des valeurs du luxe : Kering chute de 3,1%, LVMH de 2,2%, L’Oréal de 3,2%, et Hermès de 0,8%. Des prises de bénéfices logiques après le rallye alimenté par l’accalmie commerciale sino-américaine lundi. Le marché parisien peut néanmoins se targuer d’avoir effacé l’ensemble des pertes subies depuis le 2 avril, début de la salve protectionniste de Donald Trump.
À Wall Street, les échanges sont également limités. Les investisseurs semblent avoir tourné la page des tensions douanières, convaincus que le pic d’incertitudes est désormais derrière eux. Les grandes valeurs technologiques continuent de tirer les indices vers le haut. Le Nasdaq a encore gagné 1,6% hier, portant sa hausse à près de 6% en deux jours. En toile de fond, les chiffres d’inflation publiés hier aux États-Unis ont renforcé l’optimisme ambiant. Et avec lui, le fameux FOMO (voir lexique) qui pousse de nombreux investisseurs à suivre le mouvement haussier, quitte à faire abstraction, pour l’instant, des fragilités de l’économie mondiale.
Les valeurs : Bouygues, Alstom et Beneteau
Bouygues
Bouygues signe la meilleure performance du CAC ce soir : +2,69% à 38,23€. En cause, sa solide performance au premier trimestre, notamment grâce à l’amélioration de la rentabilité de sa filiale Equans. Le résultat opérationnel courant a presque triplé, atteignant 69 millions d’euros contre 26 millions un an plus tôt, surpassant largement les attentes des analystes. Equans, ex-filiale d’Engie acquise en 2021 pour 6,1 milliards d’euros, s’impose comme le principal moteur de cette progression.
Sa marge opérationnelle grimpe à 3,8%, confirmant l’efficacité du plan de redressement Perform et rapprochant le groupe de son objectif de 4% en 2025, voire un peu plus. Parallèlement, Bouygues réduit nettement sa consommation de trésorerie, avec un flux négatif limité à 79 millions d’euros contre 301 millions un an plus tôt. Le chiffre d’affaires du groupe progresse légèrement à 12,59 milliards d’euros, porté par l’intégration de La Poste Telecom. Depuis le début de l’année, le titre s’envole de 34% à la Bourse de Paris !
Alstom
Dernier du SBF 120, Alstom chute lourdement de 17,28% ce mercredi, à 18,76€, en dépit de résultats annuels supérieurs aux attentes. Ses prévisions décevantes sur la trésorerie, un indicateur clé pour le groupe ferroviaire ont été lourdement sanctionnées. Si le chiffre d’affaires grimpe à 18,5 milliards d’euros (+6,6%) et que le bénéfice net repasse dans le vert à 149 millions d’euros, les perspectives de flux de trésorerie pour 2025-2026, comprises entre 200 et 400 millions d’euros, inquiètent le marché. Ce niveau est inférieur aux 502 millions réalisés en 2024-2025 et bien en deçà du consensus (518 millions).
Alstom prévoit par ailleurs de brûler 1 milliard d’euros au premier semestre avant un rebond attendu sur la fin d’exercice, du fait d’une forte saisonnalité. Le directeur financier rappelle que cette dynamique est récurrente, mais les analystes redoutent une année de transition encore marquée par la consommation de fonds de roulement. En dépit d’une croissance attendue de 3 à 5% et d’une marge d’exploitation ciblée à 7%, les prévisions prudentes et les incertitudes douanières masquent de bonnes performances financières sur l'exercice écoulé. En somme, les investisseurs sanctionnent un manque de visibilité sur l'amélioration durable de la génération de cash. Le titre perd désormais 12% en 2025.
Beneteau
Bénéteau prend l’eau. Le leader mondial des bateaux de plaisance décroche de 9,60% à 8€ après un premier trimestre marqué par une chute de 43% de son chiffre d’affaires, à 130 millions d’euros. La direction évoque une demande en berne, un réseau de distribution attentiste et une incertitude persistante sur les droits de douane américains. L’activité Voile s’effondre de 51%, la division Moteur recule de 36%. À cela s’ajoute un arrêt temporaire de production à Bordeaux pour un changement de système informatique.
La société prévoit jusqu’à 100 millions d’euros de déstockages sur l’année, et un soutien financier à ses distributeurs américains qui pourrait rogner le résultat opérationnel de 10 millions d’euros. Un exercice 2025 qualifié de "transition" par la direction. Le marché craint surtout une année sans retour des vents porteurs... Le titre éligible au PEA-PME recule de 10% depuis janvier.
L'évènement du mercredi : "Arrondis à 1 000 Milliards"
Peu d’actus forces ce mercredi, on revient sur la tournée dans le Golfe de Trump, entamée par une visite remarquée à Riyad. Accueilli avec faste par le prince héritier Mohammed ben Salmane, le président américain a annoncé des investissements de 600 milliards de dollars de l’Arabie saoudite aux États-Unis. En réalité, une grande partie avait déjà été annoncée. Fidèle à lui-même, Trump a demandé à Ben Salmane d’arrondir à 1 000 milliards. Un contrat important de 142 milliards de dollars sur des ventes d’armes, incluant des chasseurs F-35, a notamment été conclu.
Le forum d’investissement organisé à Riyad a rassemblé les grands noms de la finance et de la tech, dont les patrons de Blackrock, Blackstone, Nvidia et Elon Musk. L’Arabie saoudite prévoit d’investir au moins 20 milliards dans l’IA aux États-Unis via la société DataVolt. Pour l’ensemble du secteur américain de l’IA, les annonces ont été assez spectaculaires, on les détaille dans notre article dédié à Nvidia, ci-dessus. Ce déplacement diplomatique et économique intervient alors que Trump revendique un rôle actif dans plusieurs dossiers internationaux sensibles, de l’Ukraine au Yémen. Il suscite cependant des critiques aux États-Unis pour avoir accepté un avion offert par le Qatar, un nouvel Air Force One.
Demain à la Une : Trump, PIB, Inflation
En plus des annonces de Trump et de l’évolution commerciale, plusieurs données économiques seront au programme demain : les PIB de la zone euro et de la Grande-Bretagne, l’inflation française, les ventes au détail et l’indice des prix à la production américains. Selon le consensus, l’Insee devrait annoncer une inflation de 0,8% seulement sur un an en avril, identique à celle de mars. Quant aux entreprises, Walmart et Engie publieront leurs résultats trimestriels. Sur le front technique, les acheteurs devraient continuer de viser à court terme les 7 865 et 7 925 points sur le CAC 40. Les objectifs des vendeurs sont à 7 800 et 7 725 points. À suivre !
Le lexique : Le FOMO
Le FOMO est l’acronyme anglais de Fear Of Missing Out, signifiant "peur de rater quelque chose". En finance, le FOMO désigne un biais comportemental où un investisseur prend des décisions précipitées, souvent en achetant un actif en forte hausse, par crainte de manquer une opportunité de gain. Ce phénomène peut conduire à des achats impulsifs, souvent à contretemps du marché, et générer des pertes pour l’investisseur.
