Jusqu'où va s'arrêter la descente aux enfers d'EDF en Bourse ? Depuis une semaine, le titre de l'énergéticien n'en finit plus de glisser. Et les motifs sont nombreux. Après l'annulation par le Conseil d'Etat du tarif d'utilisation des réseaux publics pour la période 2009-2013, le journal 'Le Parisien' avait mis le feu aux poudres en indiquant que le gestionnaire des réseaux ERDF, filiale à 100% d'EDF, devrait rembourser près de 8,8 milliards d'euros aux clients de l'électricien. EDF a démenti que la décision du Conseil d'Etat implique un remboursement des clients et a assuré qu'elle ne devrait pas avoir d'impact sur ses résultats...
Pour ne rien arranger, le coût de construction de l'EPR de Flamanville (Manche) a augmenté de deux milliards d'euros, atteignant ainsi 8,5 milliards en tenant compte de l'inflation. Au lancement du projet, en 2005, l'électricien public avait évalué à 3,3 milliards d'euros le coût de construction. Depuis, la facture a plus que doublé : en 2008, elle a été revu à 4 milliards d'euros puis à six milliards en juillet 2011 et à 8,5 milliards aujourd'hui. De quoi alourdir sacrément une facture déjà bien salée pour EDF. Le groupe affiche l'un des ratios de dette à long terme sur fonds propres les plus élevés du CAC 40, à 137%, contre 59% en moyenne pour les principales valeurs françaises. Dans ce contexte, le groupe tricolore est loin d'aborder sereinement l'année 2013. L'électricien a prévenu que son Ebitda pourrait stagner en 2013 en raison de la dégradation de la conjoncture économique, suivie d'un retour à la croissance à partir d e 2014 avec un objectif de dividende au moins stable. Autre bémol, le premier producteur mondial d'électricité nucléaire a révisé à la baisse pour la deuxième fois son objectif de production nucléaire en France pour 2012 à environ 410 térawatts/heure (TWh) contre 415 TWh visés précédemment. Sur un mois, le cours de l'action s'est contacté de 13% avec un plus bas historique à 13,4 euros observé le 29 novembre dernier...
Mais qui dit EPR... dit également Areva. L'action d'un des fleurons du nucléaire français n'a plus le vent en poupe sur la place parisienne. Une désaffection des opérateurs pour ce dossier qui entraîné sa chute jusqu'à le reléguer à 8,72 euros en juin.
Il est bien loin le temps où ces deux chouchous de la place parisienne cotaient sur les 80 euros. C'était en 2007, un temps bien révolu alors que le nucléaire affichait une mine radieuse jusqu'à... ce que la catastrophe nucléaire de Fukushima ne vienne jeter le discrédit sur cette source d'énergie, qui est jusqu'à présent la seule, mis à part l'hydraulique, a être compétitive. Le prix du mégawatt nucléaire est en effet inférieur de moitié à celui produit par le charbon ou l'éolien, et près de quatre fois moindre que celui du solaire.
Mais depuis ce drame, le nucléaire n'est plus du tout en odeur de sainteté, ni chez les investisseurs, ni chez les politiques. Pour la première fois depuis plus de 10 ans, un gouvernement français ose remettre en cause le « tout nucléaire ». Et cette nouvelle prise de position fait peser une grande incertitude quant à l'avenir du nucléaire dans l'hexagone. Rappelons que la France n'est pas la première à infliger un camouflet au nucléaire. L'Allemagne est en effet un cas d'école, le pays ayant décidé de se retirer du nucléaire dans les années à venir. Bien qu'aucune décision n'a été actée sur l'abandon de cette énergie, rien que le fait de l'évoquer tombe au pire moment pour Areva mais aussi pour EDF. Luc Oursel, le tout nouveau capitaine d'un navire en perdition doit se charger de redresser la barre en faisant table rase du passé sur le plan comptable. Les comptes 2011 avaient viré au rouge vif, des pertes largement imputables à des dépréciations d'actifs comme celle passée pour la société Uramin qui en représente près des deux tiers. Cette mine d'uranium rachetée en 2007, s'est trouvée confrontée à une hausse de ses coûts au moment où le prix de l'uranium baissait fortement. Une affaire qu'Areva a encore du mal à digérer, sans compter les provisions pour l'EPR finlandais. Le groupe avait passé une provision supplémentaire de 300 millions d'euros dans ses comptes du premier semestre. Signe que le nucléaire ne fait plus recette, le chiffre d'affaires de l'activité Réacteurs et services ne progresse que de 2,6% (+2,1% à données comparables) au troisième trimestre, affecté notamment par le retard du réacteur nucléaire EPR en Finlande. Alors pour limiter sa dépendance au nucléaire, le groupe tente de faire peau neuve en s'orientant sur l'éolien. En novembre, Areva et la Scottish Enterprise ont signé un protocole d'accord visant à développer un site industriel pour la fabrication d'éoliennes dans l'Est de l'Écosse. Ce partenariat intervient après l'installation d'usines du même type au Havre (Seine-Maritime). Reste à savoir si ce virage pris par le spécialiste français sera payant. Pour l'instant, les investisseurs n'ont pas encore reçu le message, le titre cède près de 35% depuis le premier janvier malgré une hausse de 38 % depuis son point bas observé en juin...