Réveil à 4h du matin.
Avec le décalage horaire.
Je suis au Four Seasons.
Comme toujours depuis que je viens à New York. A la grande époque. Quand je volais sur le Concorde. Je regrette le Concorde. Je regrette la grande époque.
Mais le Four Seasons est toujours là. Toujours la même chambre. Une junior suite avec vue sur Central Park au 48 ème étage.
Je zappe. La télé américaine est nulle. La nuit. Comme le jour.
J'attends 6h30. Heure d'ouverture du petit déjeuner. Un de meilleurs petits déjeuners de New York.
A 6h30 la salle est pleine. Business men en voyage, mais également business men américains. Beaucoup de banquiers d'affaires. Beaucoup. Costume bleu sombre. Chemise blanche impeccablement repassée et amidonnée. Cravate jaune ou rouge.
A 7h15, il y a un peu d'agitation dans la salle. Les têtes se tournent. C'est Loyd Blankfein. Le patron de Goldman Sachs. Un des hommes les plus admirés et les plus détestés de la planète. Un génie pour les traders, un monstre pour les anti capitalistes. Nos regards se croisent. Il ne me voit pas. Il ne voit personne. Il est sur une autre planète.
Et maintenant mon moment préféré.
Tenue de jogging . Direction Central Park à petite allure et accélération quand j'arrive au réservoir. Il est 8h et nous sommes déjà des dizaines à courir. Jeunes, vieux, hommes, femmes, maigres, gros, obèses. Chacun dans sa file. Il fait bon. Petit vent et soleil.
Je consacre ma journée à des rencontres avec mes amis de longue date, gérants de hedge funds.
Toujours le même discours. Partout. Une pensée unique. L'Europe est morte au moins jusqu'en 2015 ou 2017, une décennie perdue. L'euro va exploser. La France n'existe pas, ce sera juste un jeu de la faire sauter dans quelques semaines si l'envie leur prend, François Hollande, jamais entendu parler ou presque, les Etats-Unis font tout pour rebondir mais il est trop tôt pour savoir si c'est gagné et la Chine se plante et c'est bien fait pour eux. Partout les mêmes mots. Les mêmes réponses à mes questions.
Finalement je suis assez d'accord avec eux.
Ils ont la pêche.
Il y a une énergie ici qui n'existe plus à Paris.
Il y a plus de pauvres qu'en France. Si tu trébuches aux Etats-Unis tu deviens SDF. Si tu tombes gravement malade, tu crèves faute d'argent. Et pourtant il y a cette envie de se battre. D'avancer. De ne pas regarder dans l'assiette du voisin. Un autre monde. Comme en Asie.
Je vais rester encore une journée et je prendrai l'avion samedi matin.
God bless America.