Les marchés : Trump vs Powell
La Bourse de Paris termine la séance en hausse de 0,56%, à 7 326 points, malgré un climat alourdi par un regain de tensions politiques aux États-Unis. Si la progression de L’Oréal a permis de soutenir le CAC 40, les investisseurs peinent à digérer la nouvelle offensive de Donald Trump à l’encontre du président de la Fed qui refuse de baisser les taux. En qualifiant Jerome Powell d’« immense loser » et en évoquant sa possible destitution avant la fin de son mandat en 2026, Trump s’en prend à l’indépendance de la Banque centrale américaine vis-à-vis de la Maison Blanche.
Une menace qui, si elle se concrétisait, pourrait profondément perturber la conduite de la politique monétaire américaine. Face à ce climat d’instabilité politique, les investisseurs continuent de plébisciter les valeurs refuge. L’or en profite pleinement, atteignant pour la première fois de son histoire les 3 500$ l’once. Ce seuil symbolique illustre bien la tension sur les marchés, d’autant que Wall Street a encore chuté hier, avec un S&P 500 en baisse de 2,3%. En plus du bras de fer entre Washington et Pékin, il faut désormais surveiller celui entre Trump et Powell !
Les valeurs : L’Oréal, Schneider Electric, Legrand, TF1 et M6
L’Oréal
L’Oréal démarre l’année sur une note positive, avec une croissance supérieure aux attentes au premier trimestre, portée notamment par la reprise du marché chinois. Le géant des cosmétiques affiche un chiffre d’affaires de 11,73 milliards d’euros, en hausse de +3,5%, dépassant largement le consensus qui anticipait une progression de seulement 1,1%. La région Asie du Nord, incluant la Chine, affiche une croissance de 6,9%, alors qu’une baisse était attendue. L’Europe maintient également une dynamique solide (+4,3%). En revanche, l’Amérique du Nord déçoit, avec des ventes en recul de 3,8%, pénalisées par la faiblesse du segment maquillage et la concurrence de jeunes marques plébiscitées sur les réseaux sociaux.
Malgré ce bémol, la division luxe du groupe tire son épingle du jeu (+5,8%), soutenue par le succès de ses parfums haut de gamme. Les investisseurs ont salué ces résultats, l’action L’Oréal a bondi de 6,30% ce mardi à la Bourse de Paris, à 363,40€, signant la plus forte hausse journalière du CAC. Face à la menace de nouveaux droits de douane américains, L’Oréal se dit prêt à ajuster ses prix, à relocaliser une partie de sa production et à constituer des stocks pour limiter l’impact sur ses marges. Environ la moitié de ses produits vendus aux États-Unis sont déjà fabriqués localement, un atout pour le groupe dans ce contexte incertain. Depuis le début de l’année, le titre gagne désormais 5%.
Schneider Electric et Legrand
Schneider Electric et Legrand chutent en Bourse sur fond d’incertitudes autour d’Amazon Web Services (AWS). Les deux groupes français signent les deux plus fortes baisses du CAC à la clôture, respectivement -2,78% et -1,64%. Selon la banque américaine Wells Fargo, AWS aurait suspendu certaines négociations de location de datacenters, notamment à l’international, un segment crucial pour la croissance de Schneider et Legrand. Cette annonce intervient alors que Microsoft avait déjà indiqué récemment ralentir certains projets d’expansion de ses propres centres de données, alimentant les inquiétudes sur la dynamique du secteur.
Les datacenters représentent un moteur de croissance majeur pour Schneider Electric et Legrand, qui fournissent des équipements et des solutions d’efficacité énergétique à ces infrastructures très énergivores. Chez Schneider, les datacenters pèsent environ 25% du chiffre d’affaires, tandis que Barclays estime l’exposition de Legrand à près de 20%. Si Amazon a tenté de rassurer en affirmant ne pas remettre en cause ses plans d’investissement dans les datacenters, le marché reste fébrile. La croissance rapide du cloud et de l’intelligence artificielle a récemment dopé les valorisations des deux titres, les rendant sensibles à toute remise en cause de la dynamique du secteur.
TF1 et M6
L’idée d’un rapprochement entre TF1 et M6, avortée en 2022 sous la pression du régulateur français, refait surface. Le PDG de Bertelsmann, maison-mère de M6, a déclaré dans le Financial Times qu’il envisageait de relancer la fusion, dès que les autorités adopteront une approche plus ouverte. L’objectif est de créer un champion français du streaming capable de rivaliser avec les géants américains comme Netflix ou Apple TV+. Bouygues, actionnaire majoritaire de TF1, partage cette vision et se dit prêt à réétudier le dossier « si les conditions légales et réglementaires le permettent ».
En Bourse, le marché applaudit ce signal. TF1 progresse de 1,66% à 8,86€, M6 gagne 2,65% à 13,96€. En 2024, les deux groupes ont généré ensemble 3,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour une capitalisation boursière cumulée de 3,6 milliards
Demain à la Une : PMI et résultats d'entreprises
Au programme de ce mercredi, une nouvelle salve d’indices PMI sur l’activité des services en zone euro et aux États-Unis. En soirée, la Fed publiera son Livre Beige, on en reparle dans le lexique ci-dessous. Surtout, après le week-end prolongé de Pâques et faute d’actus fortes ce mardi, les investisseurs devraient à nouveau se focaliser sur le bras de fer sino-américain. Du côté des entreprises, EssilorLuxottica, Danone, Kering et Verallia publieront leurs résultats du premier trimestre.
Le lexique : Le Livre Beige
Le Livre Beige, ou “Beige Book”, est un rapport produit huit fois par an par la Banque centrale américaine, avant chacune de ses réunions de politique monétaire. Il offre une analyse de la situation économique aux États-Unis, par district et par secteur d'activité, couvrant des sujets comme le marché du travail, la consommation, l'industrie, l'immobilier et les finances. Les informations proviennent de diverses sources et le rapport aide à orienter les décisions de politique monétaire de la Fed.