« Nous avons la zone la plus dépressive au monde et la monnaie qui s’apprécie le plus au monde. Cette situation est ubuesque ». Voilà la charge d’Arnaud Montebourg, le ministre du redressement productif, contre l’euro fort.
Rappelant qu’ «entre 2012 et 2013, il [l’euro] s’est apprécié de plus de 10 % face au dollar et de plus de 40 % face au yen » le ministre considère que la monnaie unique « est sortie de ses clous par une surévaluation qui est devenue problématique aux yeux de tous pour nos entreprises ». Une situation à laquelle il faut remédier car « l’euro pénalise l’industrie au lieu de la soutenir dans la grave crise de compétitivité que nous traversons ».
Pour Montebourg, « Il ne s’agit pas de le dévaluer mais de le ramener à un niveau raisonnable et supportable ». Car d’après la direction du Trésor, une dépréciation de 10 % permettrait d’accroître notre taux de croissance de 1,2 %. Cela créerait 150.000 emplois, améliorerait la balance commerciale et réduirait notre déficit public de 12 milliards » souligne le ministre.
Une étude du CAE, le Conseil d’analyse économique présentée à Matignon mi-janvier, vient corroborer l’analyse faite par le ministre. Dans ce rapport, on peut lire qu’une baisse de 10% de la monnaie unique face au dollar aurait des effets positifs, étant donné que les exportations françaises hors zone euro représentent 11 % du PIB, un poids non négligeable. « Une dépréciation de l’euro de 10 %, entraînerait une augmentation du PIB de 0,6 % après un an et de 1 % après deux ans » détaille le rapport du CAE.
Pour Arnaud Montebourg, la priorité doit être d’exporter davantage alors que nous avons enregistré un déficit commercial extérieur de 61 milliards d’euros en 2013, en baisse de 6 milliards par rapport à 2012. Le déficit commercial se résorbe progressivement, mais il représente toujours plus de 2% du PIB, ce qui n’est plus le cas en Espagne et en Italie qui ont procédé à des reformes structurelles d’envergure pour restaurer leur compétitivité.
La France souffre d’un déficit de compétitivité, c’est un secret pour personne. Mais on aurait tort de faire de l’euro surévalué, un bouc émissaire. Nicole Bricq, la ministre du Commerce extérieur, reconnaît ainsi que «le cours de l’euro ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt. L’euro ne doit pas être une excuse pour masquer notre manque de compétitivité » et ce, alors que notre déficit commercial vis-à-vis de la zone euro a été multiplié par 10 en dix ans. Pourtant, nous partageons la même monnaie. De même, l’écart abyssal entre les 200 milliards d’euros d’excédent commercial dégagés par l’Allemagne en 2013 et nos 61 milliards de déficit, prouve que même avec un euro surévalué, on peut continuer à exporter.