Les marchés : Quelques milliers de milliards
La Bourse de Paris accuse le coup pour la deuxième séance consécutive. Le CAC 40 recule de 0,58% ce jeudi, tombant à 7 864 points. La trajectoire budgétaire des États-Unis continue d’inquiéter. Le projet de réforme fiscale de Donald Trump, qui pourrait être adopté dès aujourd’hui à la Chambre des représentants, agite les marchés. Non pas pour ce qu’il contient, mais pour ce qu’il coûterait. Selon les projections du Congrès, il pourrait alourdir la dette américaine de 3 800 milliards de dollars sur dix ans.
Globalement, les estimations fluctuent entre 2 300 et 5 700 milliards. On n’est plus à quelques milliers de milliards près ! Le bilan total dépasse actuellement les 36 000 milliards et si la première économie mondiale s’endette encore plus, les rendements obligataires devraient continuer de monter en flèche. Les dernières émissions de dette américaine à long terme ne rassurent pas non plus. La vente sur le marché d’obligations américaines à 20 ans a été un échec hier, avec des taux qui continuent de grimper, à plus de 4,58% sur le 10 ans, et un 30 ans qui reste campé au-dessus des 5%.
Une configuration qui pèse à la fois sur les marchés actions et sur les devises, avec un dollar en net repli. En toile de fond, l'Europe n'aide pas. En France, le climat des affaires se détériore en mai selon l’Insee, et l’indice PMI reste en territoire de contraction pour un neuvième mois consécutif. En clair, pas de catalyseur à la hausse, mais un enchaînement de signaux d’alerte. Les investisseurs lèvent le pied. Et le CAC subit.
Les valeurs : Elior, Robertet et Kalray
Elior
Le groupe de restauration collective gagne 3,84% ce soir, à 2,81€, et signe la meilleure performance du SBF 120, après la publication de ses résultats semestriels 2024-2025. Si la croissance organique reste faible (+1,5%), la rentabilité progresse fortement, avec un résultat opérationnel en hausse de 33% sur un an, à 132 millions d’euros, bien au-delà des attentes. Ce redressement s’inscrit dans la stratégie initiée par le PDG Daniel Derichebourg, axée sur la rentabilité plus que la croissance. Le groupe a notamment mis fin à plusieurs contrats jugés non rentables, améliorant son niveau de marge à 4,2%.
Son chiffre d’affaires s’établit à 3,21 milliards d’euros, en dessous des prévisions des analystes, mais Elior profite de synergies issues de l’intégration de DMS (Derichebourg Multiservices) et d’une meilleure gestion de l’inflation. Pour 2025, la direction abaisse ses prévisions de croissance (1 à 2%) mais relève ses objectifs de marge. Elior espère une amélioration commerciale plus nette en 2026. Depuis le début de l’année, l’action perd 1% à la Bourse de Paris.
Robertet
Le champion mondial des arômes naturels affiche ses ambitions à l’horizon 2030. Lors de sa première journée investisseurs, le groupe familial fondé à Grasse a dévoilé sa nouvelle feuille de route misant sur une croissance annuelle de 5 à 7% pour atteindre 1,1 à 1,2 milliard d’euros de chiffre d’affaires annuel, contre 807 millions en 2023. Pour y parvenir, Robertet mise sur une expansion soutenue dans dix pays prioritaires, notamment en Asie, au Moyen-Orient et en Amérique latine, qui devraient représenter plus de 50% de sa croissance.
Sa division Santé & Beauté, en forte dynamique, devrait doubler de poids d’ici 2030. Le groupe anticipe également une marge d’Ebitda (voir lexique) supérieure à 20%, ainsi qu’un flux de trésorerie disponible avant acquisitions compris entre 105 et 115 millions d’euros. La Bourse de Paris salue ces annonces, l’action gagne 1,80% ce jeudi, à 850€, et revient à l’équilibre depuis le début de l’année.
Kalray
Kalray décolle de 32,14% à 0,55€, après l’annonce d’un accord stratégique avec l’espagnol OpenChip. Le spécialiste français des processeurs pour centres de données a signé un premier contrat de licence non exclusif de 4 millions d’euros, dont 2 millions immédiatement versés. L’objectif est de développer un processeur nouvelle génération dédié à l’intelligence artificielle. Ce partenariat s’accompagne de discussions en vue d’un contrat de services estimé à 10 millions d’euros sur 12 mois, avec le transfert d’une cinquantaine de collaborateurs de Kalray vers OpenChip.
Mais ce n’est pas tout. OpenChip pourrait à terme devenir l’actionnaire majoritaire de Kalray. Des bons de souscription d’actions ont été émis, permettant à OpenChip de monter à 51% du capital, à un prix valorisé avec prime. Cette opération, si elle aboutit, prolongerait significativement la visibilité financière de Kalray, désormais assurée jusqu’à fin septembre, voire au premier trimestre 2026. Une bouffée d’air pour l’ex-pépite française des semi-conducteurs, qui tente de revenir dans la course grâce à l’intelligence artificielle.
Demain à la Une : La croissance allemande
Demain, le PIB allemand du premier trimestre sera publié. Le consensus de marché n’est pas très optimiste, avec une récession attendue à -0,2% en rythme annuel. Après deux ans de récession, le gouvernement Merz table sur une croissance nulle en 2025… Pour autant, cette situation n’effraie pas les investisseurs qui ont entraîné cette semaine l’indice allemand, le DAX 40, sur de nouveaux records historiques. En cause, les espoirs suscités par l’énorme plan de relance budgétaire que prépare Berlin. Sur le front technique, les vendeurs devraient à nouveau viser les 7 800 et 7 725 points sur le CAC. Les objectifs des acheteurs sont sur les 7 865 et 7 925 par extension.
Le lexique : La marge d’EBITDA
La marge d’EBITDA est un indicateur financier qui permet de mesurer la rentabilité d’une entreprise avant les effets de sa politique d’investissement et de financement. Elle reflète la performance pure de l’activité, en excluant les charges financières, les impôts et les amortissements. Plus elle est élevée, plus l’entreprise est jugée efficace dans son cœur de métier.