Les marchés : Baisse modérée après les frappes US
La Bourse de Paris continue de perdre un peu de terrain. Le CAC 40 cède 0,69% à 7 538 points (-1,2% la semaine dernière), à l’image des autres indices européens, sur fond de tensions géopolitiques accrues après les frappes américaines contre des sites nucléaires iraniens ce week-end. Si les marchés restent prudents, l’absence de flambée des cours du pétrole témoigne d’un certain calme apparent. Le baril de Brent recule modestement de 1,5% aujourd’hui.
Les investisseurs redoutent toujours une escalade, notamment une possible fermeture du détroit d’Ormuz par l’Iran, qui pourrait faire bondir les prix du brut. Environ 20% du pétrole mondial transite par ce couloir maritime. Pour l’heure, la menace semble contenue, Téhéran ayant besoin de préserver ses exportations d’or noir. Mais nul ne sait ce que réserve le régime des mollahs pour les prochains jours…
À Wall Street, la réaction est également mesurée. Les trois grands indices américains gagnent pour le moment 0,5% environ dans les premières heures d’échange. L’écart boursier des deux bords de l’Atlantique s’explique en partie par la conjoncture économique. Les indicateurs d’activité PMI révèlent un léger ralentissement de l’activité aux États-Unis et une poursuite de la contraction en France, notamment dans l’industrie.
Les valeurs : Air France, Eiffage et Carmat
Air France
Depuis le déclenchement de la guerre Israël-Iran, Air France perd 15% en Bourse. Les compagnies aériennes souffrent globalement toutes sur les marchés, depuis la suspension de leurs vols vers le Moyen-Orient. Les tensions se sont intensifiées ce week-end après les frappes américaines contre des sites nucléaires iraniens, conduisant Israël à intensifier ses opérations. En réaction, de plus en plus de compagnies aériennes internationales suspendent leurs vols vers les principales destinations de la région, invoquant des risques sécuritaires et la fermeture de l’espace aérien.
Air France a annulé ses liaisons vers Tel Aviv jusqu’au 14 juillet et suspend ses vols vers Beyrouth, Dubaï et Riyad jusqu’au 24 ou 25 juin. KLM a pris des mesures similaires, interrompant ses vols vers Tel Aviv jusqu’au 1er juillet, et prévient de possibles perturbations pour Beyrouth. Les regards se tournent désormais vers Téhéran, l’Iran promet de répliquer aux frappes occidentales qui constituent la plus large offensive militaire contre la République islamique depuis 1979. Les États-Unis appellent à la retenue, tandis que des manifestations anti-guerre émergent à travers leur territoire. Air France perd 1,84% à 7,77€ à la Bourse de Paris ce lundi, et -4% depuis le début de l’année.
Eiffage
Le groupe de construction et de concessions gagne 0,13% aujourd’hui, à 113,30€ (+35% en 2025). Depuis le début de l’année, les valeurs de la construction surperforment le marché, à l’image de Vicat (+52%), Spie (+49%), Bouygues (+30%) ou encore Vinci (+22%), bien au-delà des 2,2% de hausse du CAC 40. Un engouement en partie nourri par le vaste plan de relance allemand de 500 milliards d’euros dédié aux infrastructures, qui bénéficie aussi aux voisins français. Autre moteur : la quête de visibilité des investisseurs, dans un climat économique incertain, qui les pousse à privilégier des entreprises locales, aux carnets de commandes bien remplis et peu exposées aux tensions géopolitiques.
Eiffage, par exemple, affiche près de 30 milliards d’euros de commandes dans les travaux. La dissipation des risques politiques, notamment autour des concessions autoroutières de Vinci et Eiffage, rassure également les marchés. Bouygues, de son côté, profite de la stabilisation du marché des télécoms et du redressement d’Equans. Saint-Gobain tire profit de bons résultats et d’une accalmie sur le coût de matières premières essentielles dans la fabrication du ciment. Mais les bureaux d’analyse appellent à la prudence : la hausse des valorisations et les incertitudes politiques en France pourraient freiner le rallye dans les prochains mois. La semaine dernière, nous avons mis à jour notre analyse sur Eiffage.
Carmat
Carmat est au bord du gouffre, le cœur artificiel ne bat plus en Bourse. En grave difficulté financière, le fabricant du cœur artificiel Aeson a averti qu’il pourrait être en cessation de paiements d’ici fin juin, faute d’un financement urgent de 3,5 millions d’euros. L’entreprise, qui n’a récolté que 8 271 euros via une campagne de dons lancée en dernier recours, voit son action s'effondrer de 47,50% ce lundi, à 0,41€.
Malgré une ligne de financement de 9 millions d’euros conclue en mars avec Iris Capital, les analystes estimaient déjà que cette bouffée d’air serait insuffisante. Carmat chiffre désormais ses besoins à 20 millions d’euros d’ici fin 2025, dont 8 millions urgemment avant fin juillet. Face à un accès au financement devenu quasi-impossible pour les petites capitalisations, Carmat envisage même une sortie de la Bourse. Son président, Pierre Bastid, plaide pour l’arrivée d’un investisseur capable d’injecter 200 à 300 millions d’euros pour sauver le projet. Depuis le début de l’année, le titre éligible au PEA-PME s’effondre de 60%.
L'agenda du lundi : La réponse iranienne
On attend peu de développements économiques cette semaine. Le champ sera donc à nouveau libre pour les actualités géopolitiques. Les investisseurs surveilleront en particulier la réaction iranienne, après les frappes américaines de ce week-end, et le possible blocage du détroit d’Ormuz. Les experts sont très partagés sur ce dernier point. Sur le front économique, comme bien souvent c’est la fin de semaine qui concentrera les principales données. Avec la révision du PIB américain et les commandes de biens durables jeudi. Puis les derniers chiffres d’inflation français et américains vendredi.
Demain à la Une : En plus de la guerre...
En plus des actualités géopolitiques, ce mardi sera marqué par la publication de l’indicateur allemand IFO. Ce baromètre mensuel du climat des affaires, basé sur une enquête auprès de 9 000 entreprises, mesure leur perception de la situation économique actuelle et leurs anticipations à six mois. Le Conference Board (voir lexique) publiera également son traditionnel indicateur de confiance des consommateurs américains. Sur le CAC 40, les vendeurs viseront à nouveau les 7 500 et 7 440 points dans les prochaines séances. Les objectifs des acheteurs sont à 7 575 et 7 660 points par extension.
Le monde d'après : Tesla s'envole de 10% !
Tesla a lancé hier à Austin (Texas), les premiers essais de son service de robotaxis, présenté par Elon Musk comme l’aboutissement d’une décennie de travail. Une dizaine de véhicules autonomes, encore supervisés, ont circulé sans incident majeur. L’événement a suscité les réactions positives de plusieurs bureaux d’analyse. Surtout, Wall Street semble adorer cette perspective de développement, avec à la clé une hausse de 10,56% cet après-midi pour l’action de Musk, à 356,20$.
Les enjeux sont énormes. UBS estime que ce service pourrait générer 200 milliards de dollars de revenus d’ici à 2040, avec une flotte de 2,3 millions de véhicules. Mais la banque alerte : cette perspective semble déjà largement intégrée dans la valorisation actuelle de Tesla, qui repose essentiellement sur ses ambitions en matière d’autonomie. Selon elle, les robotaxis justifieraient à eux seuls 60% de la capitalisation boursière du groupe.
Reste que le chemin est semé d’embûches. Réglementation incertaine selon les États, adoption technologique et déploiement à grande échelle encore lointains. Pour certains experts, comme le professeur Philip Koopman, ce lancement n’est que « la fin du début » dans une course au véhicule autonome qui pourrait encore durer des décennies.
Le lexique : Le Conference Board
Le Conference Board est un institut de recherche privé basé aux États-Unis, spécialisé dans l’analyse économique et la diffusion d’indicateurs macroéconomiques. Il est particulièrement connu pour son Consumer Confidence Index, un indicateur clé de la confiance des ménages, ainsi que pour ses indices avancés utilisés pour anticiper l’évolution de l’activité économique. Ses publications influencent les marchés financiers et les décisions de politique économique.