Jamais deux sans trois comme le dirait si bien l'adage populaire. Et dans le cas d'Evonik, cette expression lui va comme un gant. Le chimiste a renoncé lundi à s'introduire en Bourse...pour la troisième fois.
A croire que les Dieux des marchés s'acharnent sur la levée de fonds qui s'annonçait comme la plus importante en Europe depuis plus d'un an. Mais le groupe industriel allemand a préféré ne pas s'aventurer sur les marchés financiers tant que ces derniers ne se souviendront pas du chemin de la hausse. La semaine dernière, certaines rumeurs laissaient déjà présager qu'Evonik aller jeter l'éponge une nouvelle fois.
Evonik, dont les trois quarts du capital sont détenus par la Fondation RAG et le solde par le fonds de capital-investissement CVC, rejoint ainsi une liste noire déjà bien fournie des projets d'introduction mis entre parenthèses ou tués dans l'oeuf en raison du manque de visibilité sur les marchés mondiaux.
Le consortium de banques introductrices, Deutsche Bank et Goldman Sachs, n'est pas parvenu à convaincre les investisseurs de souscrire au prix souhaité par les propriétaires du groupe industriel allemand. C'est que les mandataires de l'opération avaient évalué Evonik à environ 17 milliards d'euros sur la base de ses fonds propres. Ainsi, en cédant 30% d'Evonik, les deux banques espéraient en tirer quelque 5 milliards d'euros. Cette valorisation correspondrait à 6,5 fois l'EBITDA et à une décote d'introduction d'environ 10%.
Sans aucune surprise, le prix fixé a été de nature à faire fuir les investisseurs dans un contexte d'aggravation de la crise de l'euro et de ralentissement économique en Chine. Et tant que les doutes ne se seront pas dissipés, l'opération devrait être en sommeil pour au mieux quelques mois au pire deux années, selon certains observateurs.
En 2008, la crise financière avait mis un coup d'arrêt net à la première tentative d'introduction en Bourse. Evonik, patient, a attendu deux années pour tenter sa chance à nouveau. Peine perdue, sur fond de chute des Bourses au cours de l'été 2011, le chimiste a été contraint de faire demi-tour, sans un mot... La troisième tentative n'aura pas été la bonne, la demande exprimée aurait pu permettre de lever deux milliards d'euros, moins de la moitié du produit initialement visé par les actionnaires. Un montant qui n'est pas suffisant pour accélérer le développement d'Evonik. Ce dernier ayant fait état de performances « brillantes » alors qu'il est fort de 33 300 salariés et réalise 14,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires.
Certains comptaient donc sur le chimiste pour relancer un marché des introductions en Bourse asséché depuis la crise financière de 2008. C'est que la grosse opération récemment enregistrée en Allemagne date de novembre 2007 avec l'entrée en Bourse du port de Hambourg pour 1,2 milliard d'euros. Mais c'est dix fois moins que l'opération Deutsche Telekom, qui reste encore la plus importante IPO de l'histoire allemande avec 10 milliards d'euros levés, en 1996. Soit au siècle dernier...