Bonjour Michel,
C'est possible mais cette proposition revient en fait à demander aux banques centrales européennes de fonctionner durablement avec un niveau de capital foncièrement plus faible si ce n'est négatif.
Par exemple, si la banque centrale annule 1 milliard de dette, cela veut dire que la banque centrale devra elle-même renoncer à terme à 1 milliard d'euros de rentrées budgétaires qui lui étaient initialement promis.
La banque centrale fera donc une perte financière, comme une banque normale ferait une perte financière en cas de non-remboursement de l'emprunteur. Comme une banque commerciale, la perte enregistrée par la banque centrale va être in fine amortie par son capital. La banque centrale se retrouvera alors avec un capital diminué de 1 milliard d'euros.
D'un point de vue théorique, une banque centrale faisant des pertes au capital est censée être recapitalisée par l'Etat. Appliquons cela au cas de la BCE : les Etats qui ont d'abord « gagné » 1 milliard d'euros devront en partie renoncer à 1 milliard d'euros dans le cadre de la recapitalisation de la banque centrale. 1 milliard moins 1 milliard = 0. L'annulation de la dette n'aura produit aucun effet majeur à terme
La seule façon dont une annulation de dette pourrait changer quelque chose serait dans le cas où la Banque Centrale n'aurait pas besoin du niveau de capital qu'elle possède. Mais dans ce cas il n'y a aucun besoin de passer par l'annulation de dette : il suffirait simplement de demander à la Banque Centrale de transférer son capital « excédentaire » aux États. L'annulation de la dette n'est donc théoriquement parlant qu'une chimère prenant le problème dans le mauvais sens. Demander l'annulation d'une partie de la dette par la banque centrale revient à demander à la banque centrale d'avoir un capital plus faible si l'on veut que cela ait un impact sur la dette explicite de l’État. Cela revient donc implicitement à soutenir l'un de ces deux arguments : la banque centrale a un capital trop élevé, ou le capital de la banque centrale ne lui est pas utile. Le premier est difficile à juger, les banquiers centraux eux-mêmes planchant depuis de nombreuses années sur la question des besoins en capital d'une banque centrale. Le deuxième est théoriquement valide dans un monde idéal seulement ; en pratique le besoin d'indépendance financière des banques centrales tout comme leur crédibilité en dépendent souvent.
Bonne journée