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Question : partage économique mondial
Actualité et marchés
02/03/2010
Bonsoir Marc,
votre proposition de réflexion sur le nouveau partage économique mondial, l'emploi de demain, est de bon augure, mais les dés sont déjà jetés, Marc! Je peux témoigner au nom de plusieurs collègues/confrères dont les parcours d'études sont très proches: l'ingénieur en informatique employé par une SSII est confronté à la dure réalité du « marché » mondialisé. Le mouvement de fuite d'activité vers les « paradis » à main d'oeuvre à bas coût focalise depuis 4 ans les intérêts du groupe qui m'emploie encore (voir http://www.usinenouvelle.com/article/atos-origin-mise-sur-l-inde-et-l-asie.68919).

Nous gardons un humour vital en nous baptisant "les OS des temps modernes", au CV qui aurait fait la fierté de nos parents à leur époque: bac+5 scientifique/technique minimum (ingénieur/universitaire). Mais l'activité dans un futur très proche de ces OS ingénieurs n'est plus d'innover ni de créer, mais bien de passer maître dans l'art de la gestion d'équipes dites nearshore/offshore (province/Maroc/Inde) par téléphone, ou du conseil « technico/fonctionnel » auprès de grands comptes (Banque/Assurance-Industries-Telecom).

Alors exit l'innovation et le savoir faire, et get lots of savings pour les clients? Un peu oui, car pour preuve, le nouveau contrat signé par « mon » groupe (50000 collaborateurs) mi-octobre avec le 1er constructeur auto français est présenté comme un succès car il génère des « savings » au client qui aura a disposition des KPI (indicateur normalisé contractuel) pour les vérifier. Sachant que la moitié de ces « savings » est générée grâce au nouveau site indien, mon bac+5 me permet de comprendre que l' employeur aura un jour trop de ressources françaises en son sein pour toujours tirer les profits du client vers le haut, et ceux du personnel français de la SSII vers le bas.

Certes, le secteur informatique est pourtant toujours présenté comme un eldorado, une source intarissable d'emplois. C'est encore vrai pour quelques années, au point que le gratuit Métro d'aujourd'hui 1er mars réserve une page sur le phénomène. Mais l'Informatique est comme l'Economie, constitué d'une myriade de métiers, technologies, langages différents. Cette diversité cache bien entendu un revers: la spécialisation dans des domaines de niche au risque d'être démodé dans 10, 15 ans. Or, il reste ensuite 25 ans à tirer. En tant qu'expert sur le domaine abandonné ?

Entre l'effet de mode des technologies et l'externalisation, on vient à se demander si le secteur n'est pas devenu une source de déconvenue, voyez l'extrait repris de lemagit.fr:
"La plupart des grands prestataires, dont Capgemini, Steria mais aussi Atos Origin, ont déjà annoncé qu'ils ne prévoyaient plus de faire grossir leurs effectifs en Europe ; les recrutements de ces sociétés étant désormais centrés sur leurs centres de services dans les pays low cost."

On dira que c'est le jeu de la concurrence entre les SSII, mais j'attends le jour où un Wipro se paiera une SSII française. Mon actuel PdG, ancien ministre de l'économie, rien que ça, est de toute manière bien au-delà de toutes ces considérations encore hypothétiques avec son million et demi de salaire annuel bien acquis. Grâce à lui, la préservation de l'emploi 2010 au sein du groupe passe par le non partage des bénéfices. Cet homme a raison: les SSII sont les principaux employeurs du secteur informatique, alors que le désir le plus hardant d'un collaborateur SSII est d'en échapper, l'odeur des vendeurs de viandes devenant insupportable. Mais troquer Atos contre Cap, c'est retourner ses chaussettes sales de dedans dehors.

Je reste persuadé de l'existence d'une dimension critique au delà de laquelle une entreprise perd tout discernement et bon sens, et finira nécessairement par se tirer une balle dans le pied guidé par l'appât du gain à court terme. La responsabilité individuelle est diluée dans la masse, les sentiments d'appartenance à un groupe, de partage d'objectifs communs professionnels n'y résistent pas, au contraire des petites structures.

J'en viens à penser que c'est peut-être la prépondérance de firmes de taille moyenne en Allemagne qui maintient ce pays bien en haut du panier.
La solution ne serait pas de calquer au niveau national le modèle germanique, avec la rigueur, la mentalité du peuple, par hasard?

Bien cordialement, et félicitations pour toute l'équipe!
David [+]