Bonjour à tous,
J'ai trouvé l'article ci-dessous très pertinent et je pense qu'il sera utile aux abonnés d'allofinance.
Pour mémoire le Japon a été confronté à une crise similaire à celle de l'Europe au début des années 90. Depuis le prix de l'immobilier Japonais a été divisé progressivement sur 20 ans par 2
.
Ne pensez vous pas que c'est ce qui nous attends et que pensez vous de l'article ci-dessous (source blog Les Echos) :
L'immobilier, valeur refuge ?
L'immobilier pourra rapidement s'avérer inefficace pour se protéger d'une crise de la dette publique comme d'une crise de la dette privée.
Écrit par
VGuerin
Les professionnels de l'immobilier se plaisent à présenter la pierre comme une valeur refuge. La pierre aurait la faculté d'échapper aux crises financières. Sa valeur aurait même la vertu de s'apprécier en permanence. Pourtant, cette caractéristique protectrice tient plus de la métonymie que de la réalité.
L'immobilier n'est pas toujours épargné par les crises financières. À l'automne 2008, les répercussions européennes de la faillite de la banque Lehman Brothers ont entraîné une brutale contraction de l'offre de crédit. Il s'en est suivi une baisse des prix du neuf et de l'ancien, pendant plusieurs mois, partout en France. À Paris, tous les arrondissements ont été touchés. Entre le T3 2008 et les T2 et T3 2009, les prix ont baissé de plus de 7% dans les VIIe et VIIIe arrondissements, de plus de 9% dans le VIe, et de plus de 10% dans les XVIe et IIe [1].
En cas de crise, l'immobilier ne baisse pas toujours moins que d'autres actifs. Dans les années 1990, la pierre s'est dépréciée durant plus de 10 ans, tandis que la valeur des actions a plus que doublé [2]. Plus près de nous, depuis 2007 aucune véritable reprise n'a été observée dans certaines villes et régions françaises. Aux États-Unis et au Royaume-Uni, cela fait cinq ans que les prix de l'immobilier baissent, dans des proportions plus importantes que les grands indices boursiers [3].
Pour rassurer les acheteurs français, certains invoquent la prudence des conditions d'octroi, la pression démographique et foncière, et enfin l'absence de comportement spéculatif. Tordons tout de suite le cou à l'argument de la pression démographique. Depuis 25 ans et selon l'INSEE, le nombre de ménages a augmenté dans les mêmes proportions que le nombre de logements.
À Paris, la population a crû de 3% depuis 1999, alors que sur la même période, les prix de l'ancien ont plus que doublé. Les tensions sur le logement et la rareté du foncier ne peuvent expliquer à elles seules l'écart entre la croissance des prix à la relocation (+50% à Paris) et la croissance des prix à l'achat (+175%). Tordons surtout le cou à l'absence de comportement spéculatif. Certes, nous ne sommes pas dans la situation du début des années 90, où les promoteurs lançaient des programmes "en blanc" et où les marchands de biens faisaient monter les prix.
En revanche, des particuliers et des petits investisseurs achètent en ayant peur : la peur de "laisser son argent confié à des banquiers", celle de "manquer le train du parcours résidentiel", de "manquer d'argent pour la retraite". Si l'on met de côté les stratégies de défiscalisation, cette peur aboutit à des décisions d'investissement qui, au regard de la faiblesse des rentabilités locatives, du montant et de la durée des prêts, et des ratios prix sur loyers, ne se justifient économiquement que si l'on parie sur une appréciation de la valeur du bien [4]. Or, ce pari est précisément un pari spéculatif.
Quels sont, au contraire, les facteurs de fragilité du marché immobilier français ? En quoi ce marché peut-il ne pas être épargné par la crise ?
Il faut avant tout considérer que les prix sont faits par les acheteurs, et que la solvabilité des acheteurs ne dépend que de trois facteurs : les revenus, la capacité d'emprunt, le capital. Le premier facteur de fragilité est que les revenus des acheteurs stagnent, qu'ils vont vraisemblablement continuer de stagner, qu'ils diminueront si la crise s'amplifie. Du côté des charges, la fiscalité locale ne cesse de s'alourdir et les dépenses de copropriété d'augmenter.
Le second facteur de fragilité touche le capital. Le capital vient principalement de l'épargne, des plus-values, des héritages ou des donations. La fiscalité sur les plus-values s'est récemment durcie. Les niches fiscales immobilières qui ont participé à l'augmentation des prix sont rabotées. Il n'est pas impossible que la fiscalité des donations soit modifiée. Ensuite, l'utilité économique d'un investissement immobilier baisse lorsque le prix d'achat augmente. En effet, si le fruit de la vente est recyclé dans un nouveau bien, l'augmentation de la surface ou de la qualité nécessite une part croissante d'endettement, ce qui toutes choses égales par ailleurs amène naturellement à un point de blocage.
Pareillement, les loyers n'augmentent pas en proportion des prix, ce qui se traduit par une baisse des rendements locatifs, et donc de l'intérêt à investir. Enfin, alors qu'au niveau national, l'âge moyen des acheteurs est de 34 ans, certains marchés locaux, dont le marché parisien, sont caractérisés par une surreprésentation d'acheteurs âgés qui figent et immobilisent dans la pierre des capitaux autrefois plus utilement investis dans l'économie productive.
Un facteur de résilience des prix pourrait venir de ce phénomène d'arbitrage financier induit par la crise. Mais ce facteur paraît peu durable dans le temps, compte tenu de la raréfaction des primo accédants. Mais le principal facteur de fragilité est lié à la dette. En valeur absolue, le stock de dettes immobilières a triplé en 10 ans (soit un doublement de la dette rapportée aux revenus). En terme de production, la mise en force des crédits à l'habitat a presque atteint les 150 milliards d'euros en 2010, contre un peu plus de 40 milliards d'euros en 1997.
L'écart croissant entre la progression des loyers à la relocation (marché sans recours au crédit) et la progression des prix à l'achat (marché avec recours au crédit) s'explique précisément par cette augmentation colossale et disproportionnée des volumes de financement, sous l'effet cumulé des politiques monétaires accommodantes, de l'allongement des durées d'emprunts et il faut le dire, d'établissements qui ont dévoyé le crédit immobilier pour en faire un instrument trop peu rentable de captation de la clientèle.
Or, l'artifice de la dette ne permettra plus de continuer à financer la croissance artificielle des prix de l'immobilier. Les taux sont déjà à un très bas niveau, les durées ont déjà considérablement augmenté. Il n'y a plus beaucoup d'espace pour encore accroître les montants de financement, sauf à prendre trop de risques et à totalement déconnecter le coût des financements du montant des prix (mur de la dette).
Surtout, il n'aura échappé à personne que les problèmes de liquidité rencontrés par les banques sont eux aussi des problèmes de prix et de durée. D'un côté, "l'activité de transformation sur le long terme", pour reprendre une expression de Jean-Paul Betbèze, repose sur un pari de plus en plus difficile. De l'autre, les coûts de refinancement augmentent, ce qui incite à répercuter la hausse sur les taux proposés aux clients afin de maintenir les marges d'intermédiation.
Au final et comme dans le conte, s'il s'agit de se protéger d'une crise de la dette publique comme d'une crise de la dette privée, l'immobilier pourra rapidement s'avérer aussi vain qu'une maison de paille ou de brindilles.
[1] Indices Notaires - INSEE des appartements anciens par arrondissement.
[2] Valeur de différents placements, monnaie française constante, 1800-2009, dans "Le prix des logements sur le long terme", CGEDD, mars 2010, p. 65.
[3] Depuis le T3 2007, l'indice Halifax a baissé de 22% pour l'agglomération londonienne. Dans le même temps, le FSTE100 a baissé de 15%. L'indice Case-Schiller composite 20 des prix immobiliers aux USA a baissé de 32%, alors que le Dow Jones est revenu à son niveau de 2007.
[4] La faible rentabilité locative ne rémunère pas le risque en capital ni l'absence de liquidité, la même rentabilité étant servie sur des actifs liquides et à capital juridiquement garanti. Par ailleurs, avec des prix représentant parfois plus de 400 mensualités locatives (33 ans), la capitalisation des économies de loyers ne compense les coûts d'acquisition qu'au bout d'une période très largement supérieure à la durée de détention moyenne des biens, rendant la plus-value absolument nécessaire pour équilibrer l'opération lors du "parcours résidentiel".
L'immobilier pourra rapidement s'avérer inefficace pour se protéger d'une crise de la dette publique comme d'une crise de la dette privée.
Merci pour la réponse.
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